Pourquoi je manifesterai demain à Rouen pour la démocratie en Algérie

Je participerai demain à 14h au rassemblement organisé devant la mairie de Rouen au "Rassemblement citoyen pour la démocratie en Algérie". Non pour prodiguer des conseils et dire aux algériens pourquoi et comment ils doivent prendre en main leur avenir. Ils décideront seuls des modalités et du moment opportuns.
Pas non plus parce que je me sentirais "solidaire".
Je ne suis pas "solidaire" : Je suis concerné.

Et nous sommes des millions sur les deux rives de la Méditerranée, une véritable "humanité", issue des récents ou des anciens brassages de populations, produits ou témoins des soubresauts de notre histoire commune, simplement proches, amis, à sentir que se qui se joue dans les pays du Maghreb et du Machrek, potentiellement, change nos vies.
Nous sommes concernés, l’espérance est immense, parce que, simplement, la démocratie s’est invitée sans prévenir.

Depuis des décennies, d’aucuns, chefs d’état, analystes sans imagination et paresseux, apôtres de la guerre des civilisations, s’ingénient à nous faire croire que le monde arabe et musulman serait frappé d’une sorte de malédiction : inapte à démocratie, destiné à une alternative aussi cruelle que binaire : la résignation aux régimes autocratiques, dictatoriaux, et parfois criminels ou la soumission à l’islamisme politique populiste conservateur et ses extrémités violentes et criminelles.

On voit aujourd’hui ce qu’il en est : de l’atlantique à la péninsule arabique, les peuples se lèvent et donnent une nouvelle jeunesse à une aspiration universelle : la démocratie. Les islamistes, dépassés, prennent un coup de vieux. Les autocrates prennent la poudre d’escampette ou promettent des "rivières de sang".

Les révolutions démocratiques tunisienne et égyptienne, et leurs petites soeurs, qu’elles soient en cours ou qu’elles couvent dans les esprits et dans les coeurs, sont porteuses des plus belles promesses pour les foules et pour les citoyens qui les ont inventées et entreprises. Soit dit en passant, observons que ces mouvements se passent très bien des services de leaders charismatiques ou "maximo" qui ont jalonné leur histoire mais aussi la notre, et pas souvent pour notre bonheur.

Et il n’est pas dit que les changements se limitent à la rive sud de notre méditerranée. Les regards sur l’autre, du sud, ont commencé à changer, ici, depuis décembre. La promesse de changement elle vaut pour nous aussi. C’est le moment de commencer à tourner les pages. Celle du ressassement du passé colonial qui a enfermé des générations entières dans des haines recuites et des souffrances qui ont fait le lit de l’extrême droite. Celle aussi des démagogues, des lâches, qui n’imaginent plus l’Europe que cerclée de barbelés et qui tel le sinistre de l’intérieur se précipitent aujourd’hui à Nice pour attiser la peur de l’invasion tunisienne. Nous avons eu honte pendant deux mois de l’image abaissée qu’on donné de notre pays le président et les membres du gouvernement, ça continue!.

L’avenir, il appartient aux générations nouvelles qui se sont levées là bas et se lèveront demain ici aussi, je l’espère, pour bousculer, puis réinventer, nos sociétés et nos démocraties desséchées. Soutenir inconditionnellement et matériellement les démocrates dans le monde arabe est le meilleur moyen de réinventer la démocratie sous nos latitudes.Ce sont les tunisiens qui accueillent des centaines de milliers d’égyptiens, de travailleurs asiatiques, de lybiens, fuyant la folie criminelle de Kadhafi. Et nous ne pourrions pas accueillir quelques milliers de personnes? Shame on Sarkozy!

Il n’est d’ailleurs écrit nulle part que le destin des habitants du sud soit d’échouer sous nos latitudes tellement accueillantes. On peut même parier, demain, avec l’avènement de régimes démocratiques et de sociétés de justice, que beaucoup prendront le chemin inverse pour construire leurs vies et celles de leurs enfants.

Tous, nous pourrons alors, enfin circuler librement, partager le plaisir de projets communs, d’une convivialité retrouvée.
Voilà pourquoi j’irai manifester demain avec mes frères et soeurs maghrébins et tous leurs amis, quelle que soit leur origine, quelle que soir leur nationalité.