La curée

Le Figaro, Libé, la matinale de France Inter, la PQR (Paris Normandie ce matin) , tous rivalisent depuis hier en titres choc, formules et éditos qui se veulent définitifs pour faire accroire que la candidature d’Eva Joly serait compromise…

On lit même ce matin qu’elle « torpillerait la candidature de François Hollande ».

En quelque sorte sa campagne serait dans les choux mais elle serait en même temps tellement redoutable qu’elle pourrait faire échouer F.Hollande !? Comprenne qui pourra…

Mon petit doigt me dit que tous ces commentaires sont assez déconnectés du sentiment des citoyens. Ceux  sont nombreux qui attendent plus les candidats sur les contenus et les messages qu’ils portent que sur l’excellence à manier les codes des débats politiques convenus.

Ils ne sont pas non plus dépourvus d’arrières pensées. Ce n’est ni la première ni la dernière fois que les éditorialistes s’arrogent le pouvoir de dire qui est légitime qui ne l’est pas, qui est responsable qui ne l’est pas, qui va gagner les élections ou même les primaires et qui va les perdre. Parfois ça marche, souvent c’est démenti par les électeurs.

Revenons à la question qui a déclenché ce déchaînement, les propos d’Eva Joly , invitée de Jean Miche Apathie sur RTL. Le script est copié collé au pied de ce post. A mon avis très loin de l’exégèse qui en a été faite depuis 24 heures.

François Hollande lui même ne s’en est pas ému, à juste titre.

Ainsi dès le début : « Je ne me trompe pas d’ennemi. Mon objectif est de battre Nicolas Sarkozy« ..

Je n’ai personnellement pas le moindre état d’âme sur l’avenir souhaitable de notre pays.

La possibilité d’une véritable alternative à Sarkozy, d’une transformation sociale et écologique dépend de notre capacité collective à d’abord défaire le candidat de l’UMP au printemps prochain.

C’est pourquoi j’ai voté en faveur de l’accord PS-EELV au Conseil fédéral d’EELV et pourquoi je souhaite que cet accord puisse se prolonger par un accord de gouvernement en mai prochain.

Mais nous ne sommes pas fin avril 2012. Mais au tout début d’un long parcours dont personne ne connaît l’issue.

Eva Joly est candidate à la présidence. Ce qui me choque c’est qu’elle soit ainsi sommée de dire son allégeance à un autre candidat.

Ci dessous le script de la sacrilège interview:

Extrait :
Est-ce que vous appelerez, s’il est qualifié pour le second tour, à voter pour François Hollande qui s’est engagé à poursuivre la construction de l’EPR de Flamanville ?

[passage sur le nucléaire, Éva n’est pas du genre à lâcher le morceau comme ça. Aphatie non plus, dans son genre.]

Pouvez-vous répondre, Eva Joly, à ma question ?

Ecoutez : pas là ; non.

Donc, vous ne pouvez pas dire : « Oui, je vais appeler à voter François Hollande s’il est qualifié pour le deuxième tour ? »

Je ne me trompe pas d’ennemi. Mon objectif est de battre Nicolas Sarkozy parce que moi, je pense que le pays ne supporterait pas…

… Pouvez-vous répondre à ma question alors ?

… Un deuxième mandat de Nicolas Sarkozy qui creuse les inégalités…

… Bien sûr. Non mais…

… Et qui oppose les Français les uns aux autres. C’est mon ennemi.

Pouvez-vous répondre à une question…

C’est mon ennemi. C’est mon ennemi.

Pouvez-vous répondre à ma question : appellerez-vous, s’il est qualifié au second tour, à voter pour François Hollande ?

Pourquoi ne demandez-vous pas si François Hollande appellerait à voter pour moi ? C’est comme si cette situation-là ne pouvait pas se produire !

Bon, donc vous ne répondez pas à ma question.

—– fin de l’extrait ——-